-_ Engel, rien à voir avec la perfection angélique.

- Comment caractérisez vous votre enfance ?
- J'aimerai vous raconter un conte de fée, vous dire que ma vie a été toute rose, et que j'ai toujours été heureux, mais ça serait le plus gros mensonge de ma vie. Par où commencer ?
- Le commencement peut-être ? Parlez-moi de votre famille.
- Je suis le cadet d'une fratrie de 4 enfants. Mes parents adoraient les gamins, et ils ne se sont pas gênés pour en faire. J'ai deux grandes soeurs, et un grand frère. Enfin, j'avais ...
- Comment ça ?
- Vous inquiétez pas, je vous raconterai quand le moment sera venu. Avec mes frères et soeurs, ça a toujours été un peu la guerre. Quand le jeune Jordan Biltmore est arrivé au monde, ça a été le chouchou.
- Jordan Biltmore ?
- Vous comprendrez bien vite. Donc, quand je suis né, mes parents n'avaient d'yeux que pour moi. Mes frères et soeurs ont 4, 6 et 7 ans de plus que moi, donc forcément, ça leur a fait drôle. Rectification, ma mère n'avait d'yeux que pour moi. Mon père, moins il en faisait, mieux il se portait. Comme je vous l'ai dit, j'ai pas mi longtemps à marcher sur mes deux jambes, et ma mère me laissait tout le temps gambader dans la maison, et elle me suivait de partout, caméra à la main. Elle adorait me filmer quand je dessinais, quand je courrais, quand je mangeais, quand je dormais. C'était comme si j'étais le seul chez moi. Mon père a commencé ces crises à ce moment. Je sais pas trop pourquoi, j'ai jamais su en fait. Mais il parlait tout seul, il devenait agressif de temps en temps. C'était assez bizarre, mais ça m'a pas empêché de grandir. Au contraire, j'étais trop naïf à cet âge-là. J'ai commencé le sport très tôt, comme le dessin et la musique. Ma mère m'appelait "mon petit génie". Elle disait que j'avais des dons énormes, et elle voulait que je les exploite. Tous les mercredis, je jonglais entre les cours d'art et de musique, et les samedis, c'était le sport. La danse, c'est venu un peu plus tard. C'était vers mes 6 ou 7 ans je crois. Mon frère avait donc 12 ou 13 ans, et il n'écoutait que du Rap. Un soir, il m'a montré une vidéo de break. J'ai trouvé ça pas mal. Bon, en même temps, j'avais 6 ans, donc tout ce qu'on voit, on aime à cet âge là. J'ai essayé, juste pour rire, et mon frère a été bluffé. Encore une fois, il a été jaloux. Il trouvait que je réussissais tout : l'école, l'art, le sport, la danse. Quand ma mère a vu ça, elle m'a fait prendre des cours de hip-hop et de break. Mes journées étaient vachement chargées, mais à chaque fois, ma mère se libérait pour être avec moi. J'ai longtemps été exclu de la fratrie à cause de ça, et à chaque fois, je demandais à ma mère de me laisser, mais rien à faire.
- A partir de l'adolescence, ça a évolué ?
- A partir de l'adolescence, j'étais plus ce petit garçon qui se laissait marcher sur les pieds, ni par ma mère, ni par mon père, ni par mes frères et soeurs, par personne. Je restais souriant, comme toujours, mais j'ouvrais plus souvent ma gueule. Sont arrivés les sports de combat vers là. C'était un moyen de me défouler, tout d'abord par rapport à la jalousie chez moi, mais aussi par rapport à l'agressivité de mon père. Il déraillait vraiment, j'avais environ dix ans. Alcool, schizophrénie, médicaments, colères, on n'échappait à rien. Il m'est d'ailleurs arrivé de me faire frapper, non pas parce que j'avais fait une connerie. Au contraire, il en avait envie, alors, il le faisait. A l'école, je devais dire que c'était au karaté, ou au judo que je m'étais fait ça. C'était juste quelques bleus, mais qu'est-ce que j'en souffrais. Pas la douleur des coups, mais le fait qu'un père osait frapper son fils, que mon père prenait plaisir à me rouer de coups. Bizarrement, j'étais celui qui se faisait le plus frapper, et ma mère me disait qu'il était aussi jaloux que mes sœurs et mon frère. Jamais elle ne s'est vraiment inquiétée des coups qu'il nous donnait, allez savoir pourquoi. En tout cas, je passais le plus clair de mon temps dehors, et je rendais les coups que mon père me donnait. Pas sur lui, non, mais sur les gars qui m'embêtaient ou qui me cherchaient des niaises. Je passais aussi plus de temps dans mes activités extra-scolaires, et à l'école. Toute mon adolescence, ça a été pareil. Jusqu'à un soir. C'était il n'y a pas très longtemps. Le 5 juillet précisément. Je me souviendrai toute ma vie de cette date. Ma relation avec mon frère et mes soeurs s'était beaucoup améliorée. On s'entendait mieux maintenant. Mon père a fait une énième crise. Celle de trop. Il a attrapé un couteau et a égorgé ma mère. C'était la première victime d'une soirée meurtrière. 4 morts, un blessé. Mes soeurs et mon frère n'ont pas réussi à s'enfuir. Les trois ont été tués aussi. Il y avait du sang dans toute la maison, et au moment où c'était mon tour, la police est enfin arrivée. Mon père s'est enfui. Je me dis toujours qu'il est là où je me trouve, surtout dans mon appartement. Qu'il est dans la cuisine, en train d'aiguiser tous les couteaux qu'il peut trouver. La semaine suivante, j'étais en train de dormir dans ma chambre. Un cauchemar m'a réveillé, toujours le même, celui où il revenait pour finir le travail qu'il n'avait pas achevé. Mais j'ai vu son visage à ma fenêtre. Il était bel et bien là, mais il n'est pas rentré, la maison étant sous surveillance par la police. D'ailleurs, je ne sais même pas comment il a pu revenir devant ma fenêtre sans que les flics le voient. Mais je suis sur que c'était lui. Le gouvernement américain a décidé de me placer ici, en plein milieu de Chapel Hill, pour pas qu'il me retrouve. Et c'est là que Jordan Biltmore est devenue Engel Othello Harley, un jeune homme qui est parti de chez lui pour suivre des études dans une école prestigieuse de Californie du Nord. Voila, vous savez tout de mon passé.
- Est-ce que vous avez des projets pour l'avenir ?
- Bof, j'y ai jamais trop réfléchi en fait. Je pourrais vivre de mon art, ou de tout mes soit-disant dons, mais le gouvernement veut que je passe le plus inaperçu possible. Je finirai peut être en temps qu'employé de bureau, ou banquier. J'aimerai bien être architecte d'intérieur en fait. J'adore tout ce qui est décoration, meubles et tout, mais avec mes notes en ce moment, c'est pas top. On verra bien ce que l'avenir me réserve, même si, jusqu'à aujourd'hui, le destin n'a pas trop été avec moi.

- Si vous devriez vous décrire physiquement ?
- Bah, déjà, j'peux dire que la nature devait vraiment pas être heureuse de me voir arriver, parce qu'elle m'a fait blond. Y a des petites répercussions au niveau du cerveau maintenant. Non, sans rire, on me dit souvent que la première chose qu'on voit chez moi, c'est mes yeux. J'en suis plutôt fier d'ailleurs, c'est l'héritage de ma mère. Mes soeurs et mon frère avaient les yeux marrons eux, comme mon père. D'ailleurs, on peut facilement lire dans mes yeux. C'est la source de mes sentiments, on peut voir ma colère ou ma joie juste avec l'expression que je dégage. J'aime pas mes cheveux. En fait, il m'énerve à friser. Que vous dire de plus ? J'aime bien entretenir mon corps, même si je me la pète pas parce que j'ai des muscles. Je suis pas très bronzé, mais disons que ma couleur de peau me va.
- Et votre style vestimentaire ?
- Je suis pas du genre à aller m'acheter mes vêtements dans les magasins de Manhattan à vrai dire. Je suis pas très compliqué. Un T-shirt, un jean délavé, des baskets confortables, et le tour est joué. Ca veut pas dire que je ne sais pas m'habiller, au contraire. Je suis du genre à coordonner les couleurs quand même. J'aime bien porter des chemises aussi, allez savoir pourquoi. Me mettre un smoking ou un costume habillé, ça me fait toujours bizarre, mais quand je suis vraiment obligé d'en mettre un, je me force. C'est pas vraiment la mort quoi. Sinon, j'aime bien porter du bleu, du noir ou du marron.

{+} Déterminé ; Créatif ; Drôle ; Fidèle ; Attachant
{-} Froid ; Bagarreur ; Susceptible ; Renfermé ; Méfiant

- Et votre nouvelle vie, à Chapell Hill ?
- Elle est très différente de celle au Texas. Là-bas, j'étais le mec populaire, qui faisait du sport et que tout le monde connaissait. Celui à qui on demandait un portrait, ou une danse, une petite chanson ... Ici, personne ne me remarque. Je reste dans mon coin, j'essaie d'étudier, avec mes difficultés, je ne danse plus, je ne chante plus, je ne fais que fredonner les musiques qui défilent sur mon MP4, je ne souris plus beaucoup, je suis beaucoup moins accueillant. J'essaie de rester seul le plus possible, et ça m'convient, même si c'est dur.